Sabina Hunziker, professeure de communication médicale à l’Hôpital universitaire de Bâle étudie les relations médecin/patient et le fruit de ses observations en sans appel : c’est l’écoute et la parole qui assureront la réussite ou pas d’un traitement.
Nos sources : Office fédéral de la santé publique de Suisse – Mai 2018.
L’observance est la clé de voute dans le processus de soin. Mais si les premières pierres sont mal posées, c’est tout l’édifice qui menace de s’effondrer : errance thérapeutique, automédication, et un discrédit porté sur les compétences du médecin. Mais pourquoi ces deux mondes médecin/patients ne se comprennent ils parfois pas ?
Entretien avec Sabina Hunziker, professeure de communication médicale à l’Hôpital universitaire de Bâle.
Qu’est-ce qu’un bon entretien médecin/patient ?
L’entretien est de qualité lorsque les deux parties peuvent avancer leurs arguments, poursuivent un but commun et parviennent à convenir à la fin de la voie qu’elles suivront ensemble.
Quand l’entretien médecin/patient est-il mauvais ?
Quand les deux personnes ne se comprennent pas, lorsqu’il existe des malentendus et que les peurs et problèmes ne sont pas abordés. Par exemple, quand le patient parle de ses peurs et que le médecin, au lieu d’être à son écoute, ne veut lui transmettre que des faits. Par exemple :
Exemple d’un dialogue malheureux
« Patient : J’ai peur de faire un infarctus du myocarde. Je ressens des douleurs dans la poitrine et il y a des cas semblables d’infarctus du myocarde dans notre famille.
Médecin : Les résultats sont normaux. Il n’y a pas d’infarctus du myocarde.
Patient : Mais j’ai ces douleurs.
Médecin : Ne vous inquiétez pas. Nous avons exclu un infarctus du myocarde lors de l’examen clinique, à l’ECG et au vu des paramètres chimiques des analyses de laboratoire.
Patient : Peut-être quequelque chose cloche dans ces examens… »
Quels sont les différents types d’entretien ?
Il existe notamment une forme d’entretien axée sur le médecin et une autre axée sur le patient. Lorsque le patient évoque par exemple des symptômes non spécifiques et que le professionnel ne sait pas encore de quoi il s’agit, un entretien axé sur le patient est pertinent. Dans ce cas, le professionnel laisse au patient le temps de parler. Il attend et pose des questions ouvertes. Lorsque l’origine du problème devient plus claire, on peut avoir recours au modèle axé sur le médecin. Le professionnel conduit alors l’entretien en posant des questions spécifiques pour tenter de délimiter le problème. Selon la situation, il est possible d’alterner entre ces deux formes d’entretien au cours du dialogue.
En quoi la communication dans le secteur de la santé a-t-elle changé au cours des dernières années ? Entre professionnels de santé et patients, mais aussi à l’échelle interprofessionnelle ?
Les rôles, avant tout, ont fortement évolué au cours des dix dernières années. Aujourd’hui, un bon professionnel de santé doit non seulement disposer de vastes connaissances, mais aussi savoir les expliquer de manière compréhensible au patient, sous la forme qui convient. L’entretien avec le patient a pris de l’importance et est, selon moi, tout aussi essentiel que les connaissances médicales spécialisées. Une bonne relation avec le patient peut apporter davantage qu’un médicament. Plus en confiance, le patient prend davantage de responsabilités et gère de manière plus autonome sa maladie.
Comment les décisions sont-elles prises aujourd’hui entre professionnels et patients ?
Dans le passé, le médecin décidait de ce qui était bon pour le patient. Il y avait moins de discussions. Aujourd’hui, on implique souvent davantage les patients dans les décisions, notamment dans les situations où différents traitements sont possibles.
Ce principe est appelé « équipoise clinique » ou essai randomisé contrôlé. Le médecin informe alors le patient des diverses options thérapeutiques disponibles et lui explique les avantages et inconvénients. Une décision est ensuite prise ensemble. Les recherches dans le domaine de la communication montrent que les perspectives de réussite du traitement sont meilleures avec ce modèle. Cette prise de décision commune est essentielle dans certaines situations, par exemple en fin de vie ou lors de l’arrêt d’un traitement. Dans de tels cas, les proches sont souvent impliqués dans la décision et contribuent, en tant que « décideurs suppléants », à respecter les volontés du patient. Ces entretiens sont aussi très importants pour les proches et peuvent avoir un impact considérable sur l’assimilation psychosociale de l’événement.
Une décision commune améliore nettement les chances que le patient prenne le médicament prescrit ou modifie son mode de vie.
Pour aller plus loin dans la communication médecin/patient
Il existe tout une littérature dont on ne serait se passer, et qui est bien souvent disponible sur les librairies des congrès médicaux.
La rédaction d’Oasis vous conseille :
Outils et stratégies pour communiquer avec le patient – Jonathan Silverman, Suzanne Kurz et Juliet Draper – Éditions Médecine & Hygiène – 2010
1 comment