Une étude canadienne portant sur 1041 enfants de 5 à 12 ans montre que le bénéfique risque d’un traitement de désensibilisation orale à l’arachide n’est pas favorable. On appelle aussi ce traitement : immunothérapie par voie orale (OIT : oral immuno therapy). N’ayez pas peur trop vite : on vous explique ici pourquoi ce n’est pas (plus) vrai. Suspens…
La désensibilisation qu’est-ce que c’est ?
L’allergie à l’arachide est potentiellement mortelle. Elle touche 2% des enfants et 1% des adultes dans les pays industrialisés. On le pratique déjà pour les allergies respiratoires (désensibilisation aux pollens ou aux acariens). On tente de réintroduire peu à peu de toutes petites quantités d’arachide. Ce procédé dure environ un an, jusqu’à ce que l’organisme en tolère assez pour éviter une anaphylaxie en cas de contact accidentel.
Un bénéfice risque défavorable
12 études menées aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Europe et en Australie ont ainsi été intégrées à cette nouvelle méta-analyse.
La désensibilisation à l’arachide multiplierait par 2 le risque et la fréquence d’anaphylaxie (passant de 7 à 22 %). Elle multiplie par 3 le nombre d’utilisations d’injection d’adrénaline (passant de 4 à 8 %) et d’effets indésirables graves (passant de 6 à 12 %). Aussi, on constate d’autres réactions allergiques durant le traitement, tant au niveau digestif que respiratoire.
La désensibilisation orale « peut atteindre l’objectif de désensibilisation « , mais ce résultat « ne se traduit pas par la réalisation de l’objectif souhaité par le patient. A savoir réduire les réactions allergiques et l’anaphylaxie au fil du temps. Au lieu de cela, le résultat opposé se produit. Il y a plus de réactions allergiques et indésirables liées à l’immunothérapie orale qu’à l’évitement ou au placebo« , estime le Dr Derek Chu, auteur principal de la publication, dans un communiqué.
Quel avenir pour les patients allergiques à l’arachide ?
L’allergie à l’arachide n’est pas une mince affaire : elle est fréquente et le risque de mort est réel si bien que les médecins ont été tout de suite pressés d’obtenir une protection. Les OIT dont il est question dans l’étude datent maintenant d’une dizaine d’année et si je ne veux pas dire que cette étude enfonce des portes ouvertes, il est évident que les parents et les médecins témoignent bien déjà depuis longtemps de ces réactions anaphylactiques durant le traitement qui en ont largement limité la pratique.
Alors la technique est-elle condamnée? Non, bien sûr que non. D’abord l’auteur de l’étude le rappelle : il y a d’autres procédés en cours d’étude comme la désensibilisation par patch (dont les effets secondaires réels ne seront connus là aussi que lorsque la pratique aura été autorisée et utilisée largement) mais surtout il y a la vraie vie.
Les médecins ne restent pas (tous) assis bêtement à regarder leurs patients souffrir : ils cherchent des solutions. Depuis maintenant 4 à 5 ans, il est régulier de voir paraître des études d’OIT sous Omalizumlab (aka Xolair®, un anti IgE) : les effets secondaires semblent alors fortement diminués (c’est très net, les équipes sont enthousiastes) mais il faudra là aussi attendre quelques années pour savoir si le gain est supérieur aux risques… La médecine est un art et l’allergie à la cacahuète est mortelle : souvenons nous en.
Les résultats sur l’enquête APPEAL portant sur la qualité de vie des patients allergiques à l’arachide souligne que 40 % d’entre-eux vivent dans une profonde incertitude. En effet, cette enquête a été présentée lors de l’EAACI de Munich en 2018. Elle a été suivie d’une vidéo résumant les résultats de façon pédagogique.
Le prochain congrès de l’EAACI qui se tient à Lisbonne cette année débattra surement encore de cette épineuse question.
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